Certaines sorties font bruler au coeur du corps, longtemps encore après qu’elles aient été réalisées, un feu intense, irradiant de bonheur l’esprit. Cette sortie est de celles-là.
Munis de sacs avec le nécessaire pour 4 jours, nous avons commencé par… remonter la longue vallée d’Orlu. C’est non sans ressentir un certain soulagement que nous quittons la piste, non pas pour remonter le GR d’En Beys, mais pour arpenter un modeste sentier dans les hêtres dorés. Le sentier s’élève vers le plateau supérieur où notre gîte nous attend. La cabane de la jasse de Delà (juste au sud de celle de Deçà ; ça ne s’invente pas). Repus du déjeuner réparateur, nous entamons une boucle qui nous mène sur les crêtes nous dominant à l’Est, séparation avec la Cerdagne. C’est ainsi que nous gagons le col de Terrer puis le pic des Mortiers. Profitant du soleil jusqu’au dernier moment (la cabane augure le froid de l’ombre qui l’enveloppe), nous ne rentrons que pour… l’apéro ! autour d’une bonne flambée, cela va de soi.
Le second jour, nous remontons dans le froid piquant jusqu’à la Portella Gran, d’où il ne nous faut que quelques emjambées pour gagner la cime de la Cometa d’Espagne, déranger une femelle isard et son éterlou, et être bluffé par l’élégance du gypaète en vol. Notre bivouac de ce soir se situe juste en-dessous, à l’Estany Blau. Et là, c’est le drame. 1, 2, 10… pas moins de 20 randonneurs passent pour monter à la Cometa ou flaner sur les rives attirantes du lac… Nous quittons vite cette foule de bipèdes pour remonter la cheminée raide et caillouteuse du grand Péric. Et que trouvons-nous en son sommet… des wagons d’espagnols. Pardon. Catalans. Il ne nous en faut pas plus pour nous échapper vers le bas avant de remonter vers le pic de la Portella Gran, autrement moins visité que ses illustres voisins. Nous nous y installons confortablement, là aussi jusqu’aux dernières minutes du jour, afin de profiter le plus longtemps possible des rayons du soleil. Le bivouac, lui, est un vrai congélateur à notre arrivée pour… l’apéro. Inutile de préciser que le repas est un peu plus vite envoyé que la veille. La flambée de genièvre (trop verts), ne fera que nous débarraser des mouches. Le fumet de fumée, lui, nous accompagnera toute la nuit.
Au matin du troisième jour, le lac est aux trois-quarts pris par la glace. Alors que le soleil a du mal à s’extraire de l’horizon, on peut même observer la glace continuer de s’étendre, à vue d’œil. Chose qui ne m’a jamais été donnée de rencontrer par le passé ! Ca caille. -3° dans la tente. Par contre, notre exposition, à l’est, nous garantit une prompte arrivée de la chaleur. Ce dont nous profitons plus que de raison, le petit déjeuner s’éternisant. Mais quel bonheur…
Les sacs refaits, nous passons un collet, tombons sur une harde de mouflons, et traversons un zone piquetée d’une multitude de laquettes, gagnant le col de la Grava, puis le sommet éponyme. Le GR draine du monde en-dessous, mais ici nous sommes seuls. Il ne faut cependant pas s’attarder de trop, la route est encore longue. Retour vers le lac d’En Beys, en passant par les magnifiques étangs de la Grava, avant de rattaquer une nouvelle montée jusqu’à la Couillade d’En Beys rude, malcommode et très éreintante lorsque les sacs sont gonflés. Au moment d’attaquer la denière descente, je laisse mes camarades et quelques indications sur l’itinéraire, et m’envole vers la cabane afin de glaner un peu de bois avant que la nuit ne tombe. Mission accomplie. Les filles, tout sourire au dehors, et discutant (vous me direz, normal pour des filles) me rejoignent alors que l’obscurité s’est déposée dans la jasse d’Eychouze. La soirée est festive au coin du feu.
Le quatrième jour, nous revenons quelque peu sur nos pas de la veille afin d’obliquer au nord pour remonter vers la couillade de la Llause. Petit aller-retour au pic d’Ouxis, excellent belvédère sur la plupart des sommets gravis. Puis s’amorce la descente dans la jasse de Parau, ses flaques éteincelantes sur la partie haute, ses forêts lumineuses sur le bas. La voiture n’est plus très loin…
Un grand merci à Agnès et Corine pour cette virée exceptionnellement mémorable.
Nota : La présence d’un chien (Eos) ne saurait avoir eu lieu dans cette virée en partie dans la réseve nationale d’Orlu, interdisant l’accès aux canidés (autres que ceux des bergers, agents de l’ONF, et de secours). De même, l’allumage de feu (également prohibé) est purement fictif. Et pour finir, la randonnée hors sentier (absolument interdite : 130 euros par tête ou 65 par jambe) qui pourrait sembler apparaître sur certaines images n’est qu’une déformation de l’imaginaire.
Evidemment il est formellement interdit de reproduire certaines pratiques présentées ici, qui n’ont jamais eu lieu en raison d’une règlementation fort stricte dans la réserve. Je tiens à la disposition le texte relatif paru au JO n°124 du 30 Mai 1998 (p8261)
Un chien ? Où ça un chien ? On n’y voit que du feu sur les photos…
C’est bien ce que je laissais supposer.
A par ça, cette boucle a l’air bien alléchante. A garder en mémoire.
Deux filles pour toi tout seul… Whaaa… !
… et un chien aussi!