La première fois où j’ai pris conscience de l’existence de la discipline du trail, c’était lors d’une sortie APRIM, à la fin des années 90. Nous étions alors au sommet de l’Aneto (3404 m pour rappel), et depuis le col Coronas de petits fanions marquaient le passage d’une course sur le galcier qui devait mener les concurrents jusqu’au sommet, alors que le départ se faisait à Benasque. Un aller/retour en mode light où les coureurs avaient le strict minimum, c’est-à-dire des chaussures de course à pied, un short, un tee-shirt, une petite banane autour de la taille, et pi c’est tout ! Sur le moment nous les avons pris pour des ovnis.
Aujourd’hui la discipline a bien percé, et s’impose comme une autre façon de pratiquer la montagne, de courir, bien dans l’air du temps. Les organisation de trail ne cessent d’augmenter, et les participants sont toujours plus nombreux. J’ai regardé l’activité s’imposer de loin, avec une envie certaine de m’y mettre un jour, ayant un profil assez adapté à la pratique (poids léger notamment). Sarah a beaucoup moins tergiversé que moi. Elle s’est mise à la course à pied à la grande joie de son papa qui l’a pratiqué à peu près au même âge, à un niveau qui force le respect. Sarah a trouvé une source de motivation supplémentaire, et a enchainé les courses. Néanmoins, je trouvais que ses épreuves manquaient un poil de relief. Courir 10 km autour de Blagnac ne m’excitait guère et je préférais encore courir derrière un ballon comme je le fais tous les lundis avec mes potes footeux. Mais lorsqu’elle me propose de courir à Quillan pour un trail de 1000m de dénivelé, mon oreille frétille. Renseignement pris, c’est décidé, ce sera mon premier trail. Un entrainement de 20 km une semaine avant, et voilà, je ne peux plus me défiler, Sarah et Xavier (qui s’est mis à la pratique lui aussi) m’attendent au tournant. Malheureusement pour ce dernier un état fiévreux l’empêche de s’aligner sur la course. Qu’à cela ne tienne, Clémence vient avec nous pour se tester sur le 13 km.
Nous partons la veille, et dormons à Quillan. Nous trouvons un petit resto typique (Café de la Gare), et l’heure n’est pas à la diététique. Nous réservons cela à ceux qui jouent la gagne ! Le lendemain matin, il faut se lever tôt, et bien s’alimenter pour la course ne nous est pas naturel. Clémence et Sarah s’essaient à un plat de pâtes, histoire de faire comme les pros. Personnellement je m’en tiens à de bonnes bonnes tartines de confiture…
L’heure du départ approche. Nous retrouvons Mickey, le papa de Sarah qui des Corbières n’a pas voulu rater le départ de sa fille.
8h30 le départ est donné. Quelques badauds sont là, quelques élus aussi, trop contents de se lever un dimanche matin pour saluer des coureurs en lycra… N’ayant fait aucun échauffement et n’ayant aucune expérience en la matière, l’option de démarrer doucement est décidée. Et c’est tout normalement que je me retrouve dans le cœur de la course, me calant sur l’allure de coureurs qui me semblaient crédibles (mes critères de choix sont alors inconnus, en fait je suis là où je suis, sans trop savoir pourquoi, et je m’en satisfait pleinement). Les 4 premiers kilomètres conviennent à mon moteur diesel. On s’élève au-dessus de Quillan. Le beau temps est finalement clair alors que l’on pouvait craindre des ondées, annoncées pour l’après-midi. Au village de Ginoles, je croise Mickey qui avec sa voiture suit la course. D’ici la pente change, et les coureurs s’arrêtent de courir. Je fais de même. Un sentier s’enfile dans les bois et nous gagnons rapidement de l’altitude. Nous voilà dans le dur effectivement. Aux abords de Coudons, nous atteignons le premier ravitaillement. Les coureurs se s’arrêtent que quelques secondes. Pas de doute, le chrono tourne. J’aurais préféré m’arrêter un peu plus, mais bon… Peu après la pente s’élève de plus en plus. Il faut alors s’aider des branches pour mettre un pied devant l’autre. Les premiers passés laissent un sentier glissant à ceux qui suivent. Je jette un coup d’œil à la montre, le dénivelé se cumule vite. On ne devrait pas être loin du sommet. Et en effet nous débouchons enfin sur le haut du Pech Tignous (nous le laissons en fait légèrement sur notre droite). Entre les petits arbres, nous apercevons la vallée et nous apprécions. Je lâche un “on est mieux là qu’au boulot” qui fait marrer le coureur devant moi. A la descente il me laisse passer, sentant que je frôle ses talons. Les quelques minutes de répit ne sont pas de trop avant une nouvelle petite montée sur une piste, là où la neige n’a pas fondu. Elle tapisse le sol, donnant une belle ambiance aux alentours. C’est au détour d’un virage que se trouve le second ravito. Nous reprenons notre route par une piste forestière. Je craignais ce passage, le pensant très boueux. En fait la neige est de plus en plus présente, et porte bien. La portion est facile et avant la partie descente (la vraie !) je pense à m’alimenter.
Petit à petit la pente s’accentue et nous voici vraiment dans la descente. Rapidement je comprends que je suis plus à l’aise que la moyenne et je reviens souvent sur des coureurs. Cela m’encourage bien sûr. La pente est désormais forte, et à plusieurs fois je manque presque mes virages. Là j’avoue, je m’éclate comme un petit cabri. Mon passé “montagnard” m’aide probablement, et je m’étonne presque de mon aisance. Cela ne va pas durer… Après avoir rejoint une piste descendante, j’essaie d’allonger la foulée, mais bof, bof, ça manque de jus tout ça. Et le sentier repart franchement dans la pente, ah oui, là je préfère. Mais tout cela a une fin. Au chalet de Garach le parcours reprend la montée. Ce n’est qu’une piste, mais c’est dur, boudu. Les coureurs qui me précèdent marchent. Me servant de prétexte, je fais de même, me disant qu’ils savent ce qu’ils font. Un 3ème relais est le bienvenu. Le gars qui sert de l’eau : “alors ça va, pas trop dur?”, et moi de secouer la tête en guise de réponse. Je bois pas mal, le Camelback se vide peu à peu, et il faut gérer.
S’en suit la partie la plus spectaculaire du circuit. Au-dessus des Gorges de Pierre-Lys, le sentier se joue du relief. En fait il n’y a pas plus vraiment de sentier. Des mains courantes nous aident à progresser, et nous sommes bien perdus dans la végétation, c’est assez irréel. Nous passons au Trou du Curé (oui oui M’sieurs, Dames), superbe moment. En bas l’Aude, bien grosse, fait entendre ses remous. Le tracé repart vers Quillan, et c’est alors que je recroise Mickey, il m’annonce que je suis 33ème. J’avoue que j’ai du mal à y croire. En fait, je pensais être beaucoup plus loin dan le classement. Cela me donne une nouvelle source de motivation. Et il y en a besoin à ce moment là de la course. Le reste se compose de petites montées et descentes, oh pas bien dures, mais qui après 20 km font bien mal. Sur une montée où j’essaie de revenir sur des coureurs, paf, une crampe au mollet droit. Mince. Quelques instants plus tard, je tente le même effort, re-paf. Bon ok, Sam, maintenant, il s’agit de rallier l’arrivée et de ne pas faire le malin. Je regarde la montre, pfff, encore 4 km. Je ne vais jamais y arriver. S’aligner sur un trail, c’est une chose, il faut le faire aussi ! L’effort ne tombe pas du ciel. La montre m’assiste dans ces derniers kilomètres. Elle m’a été précieuse durant toute la course, juste histoire de se rassurer, mais là elle m’encourage.
Nous quittons enfin les sentiers et après une dernière partie bizarre sur une ancienne voie ferrée défoncée (où l’on manque de faire valser les chevilles à chaque foulée) nous rentrons dans le village. La trentième place n’est pas loin, mais les jambes n’ont plus de mordant, impossible de revenir sur les gars de devant. Je les fixe, mais impuissant. Je passe juste un concurrent qui m’y invite :”vas-y passe devant, je suis à bloc !”. Sur la place, les premiers arrivés vous félicitent. C’est sympa. Les jambes sont dures, et ça tape fort dans la tête.
Je retrouve Clémence qui a clôt son trail de 13 km il y a un moment, et je lui confie ma course.
Sarah arrive un peu plus tard et nous l’encourageons sur les derniers hectomètres. Elle est toute rouge, et un peu carbonisée ! Ouf, elle finit à la 7ème place féminine (sur 8!), parmi les 100 concurrents alignés.
Ce premier trail restera un super souvenir. Sur le chemin du retour, nous envisageons tout un tas de course dans les environs, il n’en manque pas. Reste à savoir si nous réaliserons tous ces projets.
Merci à Mickey pour les photos
Le suivi de l’enregistrement de ma montre Ambit Suunto durant l’épreuve: c’est instructif : www.movescount.com/moves/move11745030
Ci-dessous la trace dans Openrunner
Beau challenge! Bravo.