6 jours sur la HRP [3/6]

Étape 38 : Pla de la Beguda – Refuge d’Ull de Ter
– 24 aout 2012 –

Le lendemain matin, le vent est absent. Le jour se lève à peine, et les yeux embrumés ne distinguent pas s’il fait grand beau, ou si c’est couvert. Quelques secondes après, pas de doute, il fait bien beau. Nous attend une étape plutôt courte, qui nous verra basculer en Espagne, sur les hauteurs de Nuria.

Il faut être patient pour remonter la vallée d’Eyne, mais le plus long est fait. Il ne nous reste plus beaucoup de dénivelé afin d’arriver sur le col d’Eyne. Le peu qu’il reste est vite avalé, à la fraîche. Nous dépassons deux tentes qui s’étaient installées au-dessus de nous. Elles se réveillent à peine. Encore plus haut des isards squattent les pierriers. On en comptera une soixantaine ! Le décor est très minéral, et je me souviens de photos prises avec Stéphane lors de notre traversée en 1993, et tentent d’en retrouver le cadre. L’endroit nous fait perdre tout repère. Le vent est désormais vigoureux à l’arrivée du col. D’ailleurs, ce doit être fréquent, rien n’y pousse, si ce n’est les cailloux. Une pancarte indiquant que nous sommes sur le GR 11 a du mal à rester debout. On gardera d’ailleurs ce sentier jusqu’à l’arrivée du soir. Sur la crête frontière, très large, nous filons vers l’Est afin de frôler la cime du pic d’Eyne, contourné par le Sud. Par contre, le sentier passe bien au sommet du pic de Nou Fonts (2861 m). Le vent souffle toujours très fort, et les nuages sont là, mais très haut dans le ciel.
Nous apprécions le tracé de la HRP, tout en crête. Au Sud, dans la vallée, le Sanctuaire de Nuria parait un palace au milieu d’un désert, et la pelouse bien verte qui l’entoure tranche bien avec les environs. Au Nord, les vallées partent dans tous les sens, semi-désertiques aussi en cette fin août. Bientôt nous apercevons les lacs de la vallée de la Carança. Au loin, le Madres est une montagne qui n’en peut plus de s’étaler.
Nous croisons pas mal de gens sur ce parcours. Apparemment c’est une grande classique catalane. Les randonneurs défilent, équipés très légèrement, et une bonne moitié d’eux sont chaussés de chaussures de trail, ou assimilées. Je ne sais pas si Kilian Jornet est populaire en Espagne, mais beaucoup ont son profil (homme comme femme). C’est assez étonnant. On parait être des ovnis, nous, avec nos sacs de plus de 15kg. D’ailleurs, durant ces quelques jours, cela aura été la leçon à retenir, notre matériel a vieilli. Non pas que les années pèsent trop (notre rythme est désormais calé ou presque sur celui d’Axel et Melchior), mais le matériel a évolué, et avec Sarah on pourrait gagner quelque kilos, oui sans soucis. Cela fait un bon moment que nous n’étions pas parti ainsi en itinérant, plus de 2 jours. Et nous pensions toujours avoir du matos tip top, et bien non, malgré notre situation privilégiée par rapport à notre profession, ce n’est plus le cas. Personnellement, mon sac à dos est fatigué, et mon sac de couchage est bien trop encombrant, et lourd. Voilà qui fera un bon sujet de conversation avec mes collègues à mon retour.

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Toujours vers l’Est, nos pas nous emmènent aux abords du Pics de la Vaca. Nous les contournons par le Sud, et après le col de Tirrapits, nous plongeons sur un plateau où coule enfin de l’eau. Oui de l’eau, enfin, un filet d’eau plutôt. Pas grand chose pour se rafraichir sur les crêtes, et le vent nous a bien desséché. Dans les pelouses, nous mangeons, tranquille, sous le soleil désormais revenu.
Le col de Marrana (2529 m) est la dernière petite difficulté du jour. Nous ne nous y attardons pas, le vent est toujours aussi fort, c’est infernal ! Nous arrivons alors sur les premières pistes de la station de ski de Vallter, dernière station avant la Méditerranée. Ce n’est jamais très agréable de traverser une station en été, mais le cadre est agréable. Rapidement nous tombons sur le refuge d’Ull de Ter, joliment placé, au milieu des pins, avant une rupture de pente. Il est alors 14h 30. Nous avons l’après-midi pour nous reposer, faire de la lessive, nous rincer au torrent, bouquiner…
L’endroit est superbe mais difficile de trouver un endroit plat pour poser nos deux tentes. Il faut dire que de mon côté, je suis assez exigeant. Les espagnols doivent tous dormir au refuge, car il n’y a pas grand aménagement pour les tentes. Ce n’est que tard dans l’après midi, que nous trouverons notre spot, après avoir traversé une piste qui passe non loin du refuge. L’endroit est superbe, au pied des crêtes du Gra de Favol.
Ouf nous voilà installés, nous allons voir si le bar du refuge a été ravitaillé… La fin de journée sera douce à blatérer de choses et d’autres, autour d’une ou deux caña, installés dans la véranda ouverte vers le Sud-Est. Le repas au refuge aura été un bon moment, et le rôti aux champignons aura été apprécié de tous. Repus, nous regagnons nos tentes en faisant bien attention à ce qu’aucun skieur ne nous coupe la route !

[à suivre…]